L'hétérosexualité "par défaut"

Via Philippe Watrelot, et le facebook de Pierre Maura, je découvre les déclarations de Christine Boutin à propos d'un court-métrage d'animation mettant en scène une histoire d'amour homosexuelle - entre deux poissons, précisons-le. Egale à elle-même, et à tous ceux de sa tendance politique, son propos oublie simplement combien la normalité et l'évidence sont de puissants discriminateurs.

La lettre ouverte qu'elle a adressé à Luc Châtel est reprise sur le site du magazine Têtu. Ce premier passage est significatif :

« La neutralité philosophique et politique s'impose aux enseignants et aux élèves, » lit-on sur le site de l’Education nationale. Or, ce film bafoue le principe de la neutralité de l’enseignement public en s’immisçant dans la conscience et l’intimité des enfants sans égard pour la responsabilité éducative de leurs parents.

Christine Boutin invoque la neutralité pour justifier son refus d'un film d'animation présentant une histoire d'amour entre personnes du même sexe. C'est évidemment parce qu'elle considère que les histoires d'amour entre des personnes de sexe différents sont "neutres". Seuls les homosexuels ont une sexualité spécifique, les hétérosexuels, eux, ont une sexualité neutre, "normale, "par défaut". De la même façon, certains considèrent que seules les femmes ont un genre, les hommes sont normaux ; seuls les Noirs ont une couleur, les Blancs sont neutres. Voilà une fois de plus une majeure implicite...

On se demande donc si Christine Boutin, pour défendre la neutralité dont doivent se prévaloir les enseignants, viendra également à refuser que l'on s'immisce dans la conscience et l'intimité des enfants en leur racontant des histoires mettant en scène l'hétérosexualité... Présenter, comme le fait Christine Boutin, l'hétérosexualité comme étant neutralité, voilà qui est profondément discriminatoire pour les personnes homosexuels, renvoyées à l'anormalité.

Et ça continue, bien sûr, dans le reste de la lettre :

Vous comprendrez comme moi que « l’apprentissage du respect de l’autre et de sa différence », intention officielle du film, ne peut se faire en niant une différence fondamentale, la différence des sexes, qui est constitutive de notre humanité

Si l'on sait, depuis Françoise Hériter, que la distinction entre masculin et féminin est constitutive de la façon de penser de l'humanité - on oppose partout masculin et féminin, de la même façon que l'on oppose haut et bas, chaud et froid, extérieur et intérieur - on ne peut pas dire que l'homosexualité revient à nier la différence entre les sexes. Elle signifie simplement que l'opposition masculin et féminin est avant tout une opposition de genre, c'est-à-dire de comportements socialement considérés comme masculins et féminins, plutôt qu'une opposition de sexe au sens biologique. Il y a des homosexuels très masculins et d'autres très féminins - et il peut s'agir, dans un cas comme dans l'autre de mâles ou de femelles.

S'il ne s'agissait que des délires de Christine Boutin, les choses ne seraient pas si graves. Même si cette façon de penser se limitait à quelques cercles conservateurs, promoteurs de manières bien peu tolérantes de pratiquer leurs religions, mon propos ne serait que la réponse facile à un discours emprunt volontairement de simplicisme. Le problème est que ces discours s'appuient sur des façons de penser relativement répandu, même si rarement explicitées. Souvenez-nous de la ficelle de Becker dont je parlais il y a quelques temps : dans une argumentation, la majeure d'un syllogisme est souvent implicite. Ici, les propos des adversaires du Baiser de la lune s'appuient sur l'idée que l'hétérosexualité est l'état par défaut des individus, ce qui leur permet de suggérer d'homosexualité à l'école n'est pas neutre, et, en outre, qu'on va influencer ces pauvres petits.

On a tendance, en effet, à toujours se poser la question de "comment devient-on homosexuel", qu'est-ce qui "fait" que les individus deviennent homosexuels. La réponse est pourtant simple : la même chose qui fait qu'ils deviennent hétérosexuels. On devient tout autant hétérosexuel que l'on devient homosexuel. La question devient alors "qu'est-ce qui détermine la sexualité d'un individu quelqu'il soit ?". La différence est d'importance puisqu'elle revient à cesser de regarder l'homosexualité comme un écart à une norme pour s'intéresser à un processus plus général. Tant que nous continuerons à penser qu'il existe des comportements par défaut, nous laisserons la place pour que des gens comme Christine Boutin laisse libre cours à leurs discours discriminatoires. En témoigne les "reculades" de l'Education Nationale.

24 commentaires:

Fr. a dit…

Héritier, et Badinter, et…

Ah, Boutin. Presque un poème.

prince2phore a dit…

Mouais, même si je n'ai pas vraiment encore d'avis sur ce cas particulier, surtout que je n'ai pas vu le film, il y a quand même des choses qui me dérangent dans votre argumentation.
Déjà amalgamer la sexualité et la couleur de peau je trouve ça moyen comme procédé. la distinction entre sexualité et genre n'est plus à faire, ok, il n'en reste pas moins que la question n'est pas là.
Il s'agit pour moi bien d'une norme sociale, construite, une convention de considérer l'hétérosexualité comme neutre. Il n'en reste pas moins que c'est un fait pour la majorité de la population. à partir de là vous pouvez vouloir changer la donne, mais il faudra a minima passer par un débat de société. celà ne me dérange pas personnellement, je me fais un peu pour l'occasion l'avocat du diable.
mais si ce genre de film a une influence (vous indiquez une piste sur la façon d'acquerir sa sexualité quelqu'elle soit, mais on n'en sait pas plus à la fin de l'article) sur les enfants, il convient alors de discuter des conséquences. Il ne me semble pas illégitime de se poser la question de savoir si c'est bien à l'école de prendre en charge cette démarche, ou à quel âge on peut vraiment en parler aux enfants de manière efficace et "neutre".
Ce n'est pas parceque le comportement sexuel est construit socialement qu'il devient injustifiable que la norme d'une société ne soit plus l'hétérosexualité. Il y a un long chemin et assez de place à mon avis entre discriminer les homosexuels et faire la promotion de l'homosexualité comme comportement librement choisi.
Car si certain choisissent librement leur sexualité, cela devient alors du ressort de la culture et de choix personnel. Partant de là et en tant que parent, je verrai d'un mauvais oeil que mon fils soit exposé à l'école à des discours que je ne cautionne peut-être pas en la matière.
Pour ma part je n'ai jamais eut à visionner de tels films étant enfant et je peux vous assurer qu'in fine je ne suis pas devenu homophobe (loin de là) ou raciste pour autant.
Bref, pas d'accord avec boutin certes, mais pas convaincu pour autant par votre billet, qui m'aura quand même fait un peu parler, c'est déjà ça.
bien cordialement.

Denis Colombi a dit…

"C'est l'histoire d'un mec... un mec normal... hétéro, quoi" aurait pu dire Coluche.

Le fait que la majorité de la population soit hétérosexuelle ne donne pas le droit de considérer que celle-ci est normale et que les autres sexualités sont "non neutres", anormales. La majorité de la population est droitière, cela justifie-t-il que l'on refuse une histoire dont le héros serait gaucher ? La majorité de la population est blanche, serait-il non neutre de diffuser à de jeunes élèves un film dont le héros est noir ?

Le reste de votre commentaire soulève bien le problème : vous dites que l'homosexualité est un comportement librement choisi. Cela est en directe contradiction avec les témoignages des homosexuels, qui se découvrent tels sans pouvoir rien y changer - et étant donné les discriminations qui pèsent sur eux, la stigmatisation et la honte, ne serait-il pas plus simple de faire l'autre "choix" si cela est possible ? Vous continuez à réfléchir comme si l'homosexualité était un choix, tandis que l'hétérosexualité est "par défaut". C'est bien ce que je critique.

Je ne sais pas d'où vient l'homosexualité. Mais je ne prétends pas non plus savoir d'où vient l'hétérosexualité. Tout ce que je dis, c'est que les deux doivent avoir des explications symétriques : si l'homosexualité est génétique, alors l'hétérosxualité l'est aussi ; si l'homosexualité est sociale, alors l'hétérosexualité l'est aussi.

Et si la question est celle de l'éducation des parents et du rôle de l'école, alors pourquoi l'école pourrait-elle faire la promotion de l'hétérosexualité et pas celle de l'homosexualité ? Si montrer une histoire d'amour homosexuel n'est pas neutre, alors montrer une histoire d'amour hétérosexuelle ne l'est pas non plus. Accepteriez-vous qu'un couple homoparental vienne protester contre un film diffusé dans leur école montrant des couples hétérosexuels ?

Bref, vous continuez à considérer l'hétérosexualité comme le choix normal, par défaut, et l'homosexualité comme une particularité, certes tolérable, mais une particularité quand même. C'est ce que je dénonce.

prince2phore a dit…

Nous nous sommes peut-être mal compris, je vais essayer d'éclaircir mon propos.
Tout d'abord sur les mots, ils ont leur importance ici comme dans tout débat. Si je prends la définition académique de la norme : Type, état, comportement qui peut être pris pour référence ; modèle, principe directeur qu'on tire de l'observation du plus grand nombre.
En ce sens l'hétérosexualité, en France, est bien la norme et l'homosexualité ou la bisexualité (trop souvent oubliée il me semble) sont bien anormaux. Ce qui ne dit rien en soit sur la façon de les considérer bien sûr !
Sur l'acquisition de sa sexualité, je ne pense pas non plus que cela résulte d'un libre choix, quels choix faisons-nous par ailleurs qui soit vraiment libre ? vaste question... Il s'agissait simplement de considérer cette hypothèse qui peut tout de même recouvrir une certaine réalité.
Si maintenant nous acceptons l'idée que pour la majorité des homosexuels, il ne s'agit pas d'un choix, la question change quelque peu. De la même manière que pour moi le féminisme devrait se fondre dans l'humanisme, si je devais insister via l'éducation de mes enfants sur des valeurs, je ne le ferai pas de manière si précise. le problème n'est plus de montrer pour moi que l'on peut aimer qui on veut mais plutôt de tolérer tous les comportements qui ne portent pas atteinte à notre propre liberté.
Et là nous revenons à au débat plus large que vous présentez encore une fois d'une manière qui me déplait, je m'explique.
Vous prétendez ne pas savoir d'où vient l'hétérosexualité, étrange position s'il en est. Le propre de l'homme est bien d'avoir développé une culture et à partir de là de s'échapper de sa condition animale via une évolution non plus biologique mais culturelle (voir les memes de Dawkins). En ce sens la sexualité devient un comportement, surtout depuis l'avènement de la contraception, complètement décorrélée de la reproduction. Ou du moins peut le devenir. Il n'en reste pas moins que la reproduction et la survie de l'espèce m'apparaissent comme l'origine indiscutable de l'hétérosexualité pour notre espèce comme pour d'autres. Il m'apparait aussi qu'on est toujours en droit, par choix culturel, de vouloir continuer à corréler les deux, sans pour autant l'imposer au autres. En ce sens une société peut vouloir garder l'hétérosexualité comme norme.
Faire la promotion comme vous dites de l'hétérosexualité à l'école présente pour une société un avantage certain. En tout cas pour la société et l'économie telle qu'elle sont organisée aujourd'hui, libre à vous de vouloir changer la donne mais ce combat s'inscrit pour moi à minima dans une démarche politique et un projet de société que tout le monde n'est pas obligé de partager.
Aucune animosité dans mes propos, encore une fois je ne suis même pas opposé sur le fond à de tels bouleversements sur le long terme mais je revendique le droit à un débat ouvert.
Pour finir et pour à mon tour user d'allégories douteuses, je suis athée mais tolère plus ou moins bien les croyants dans mon pays. Je ne pense pas que l'être relève vraiment in fine d'un choix librement fait (la forme de la croyance peut-être). La laïcité pose une neutralité presque totale en la matière, reléguant le choix à la sphère exclusivement privée. Pour autant la république française ne reconnait aucun dieu et tire sa légitimité du peuple, en ce sens elle dicte malgré tout pour nous une norme, surtout comparé à tous les pays qui disent tirer leur légitimité de dieu.
Il en va de même pour moi de la sexualité, libre choix pour chacun même si déterminé socialement ou biologiquement, mais la norme reste l'hétérosexualité.
Maintenant si vous voulez changer la norme, avancer des arguments.
Pour ma part je ne vois pas vraiment de discrimination faite autour de moi, que ce soit en privé ou en public, aux homosexuels. Mais je vis peut-être dans un monde à part :)

Denis Colombi a dit…

Le premier problème dans votre propos, c'est que vous passez d'une définition toute statistique - et non sociologique - de la norme au normal, et donc à l'anormal : ce n'est pas parce que l'hétérosexualité est le comportement le plus courant qu'il doit servir de "modèle, de principe directeur". Or, ici, l'enjeu est bien là : il ne s'agit pas de convertir les enfants à l'homosexualité, et il faut être d'une absolue mauvaise foi ou d'une profonde stupidité, comme Boutin dans les deux cas, pour penser que parce que l'on diffuse une histoire présentant un couple homosexuel on va faire des enfants des petits homosexuels en puissance ! Peut-être aidera-t-on ceux qui le sont à s'accepter plus facilement, c'est tout.

Vous trouvez étonnant que je sache pas d'où vient l'hétérosexualité. Mais l'explication que vous avancez n'a d'évidence que l'apparence : c'est une explication bassement évolutionniste, qui, d'une part, ne pourrait pas expliquer pourquoi les cas d'homosexualité sont aussi courant chez les animaux que chez les humains, et, d'autre part, est peu adapté aux comportements - la mémetique a d'ailleurs été un cuisant échec.

Vous écrivez d'ailleurs : "Il m'apparait aussi qu'on est toujours en droit, par choix culturel, de vouloir continuer à corréler les deux, sans pour autant l'imposer au autres". N'est-ce pas précisement ce qui se fait lorsque l'on accepte parfaitement que l'on présente aux enfants des histoires de couples hétérosexuels tout en refusant qu'on leur présente des histoires de couples homosexuels ? N'est-ce pas là imposer aux enfants comme seule acceptable une forme particulière de relation ? Vous parlez de laïcité : dans une école, il est interdit de faire la promotion d'une religion, pas d'en parler. Si on ne présentait aux enfants que des histoires mettant en scène des catholiques, n'y verriez-vous pas une entorse inacceptable à ce beau principe ? C'est pourtant ce qui se passe avec l'hétérosexualité.

Et si vous ne voyez pas de discriminations, pensez un peu à toutes les pièges du langage : "pédé" et "enculé" demeurent des insulte très usités dans les cours d'école... imaginez qu'on les remplace par "nègre" ou "bougnoule"... Voyez-vous les discriminations sous cet angle là ?

Et lisez ça aussi : http://djou-bd.over-blog.com/article-31393970.html

prince2phore a dit…

ce n'est pas ma définition statistique de la norme, c'est la définition du dictionnaire de l'académie française... Après je pense avoir été assez clair sur le fait que ça n'impose en rien de figer ce fait. On peut tout à fait vouloir changer cette réalité qui n'a rien d'immuable ou de plus juste qu'une autre...
Quand au dessin animé je redis que je ne suis pas contre a priori, je ne l'ai pas vu et ne suis pas psychologue et aurait donc bien du mal à juger de ses effets sur des enfants de CM1.
Je citais l'évolution biologique pour expliquer la présence de l'hétérosexualité dans notre espèce, c'est aussi valable pour les bonobos que pour nous, et dans les deux cas ça n'invalide en rien le fait que la sexualité chez les especes évoluées répond à d'autre critère que la simple reproduction ! Cela permet toutefois de comprendre qu'un sous-groupe d'une espèce sexuée pratiquant exclusivement l'homosexualité n'aurait jamais passé les barrières de la sélection naturelle, ou est le mal à dire ça ? Une fois dé-corrélé la reproduction de la sexualité, on peut tout à fait imaginer toute sorte de rapports sexuels, sans pour autant nier la dimension particulière de l'hétérosexualité dans le rôle qu'elle joue dans la reproduction (et qui est toujours d'actualité malgré tout, même si de moins en moins).
Autre point que vous reprenez, oui nous imposons à l'heure actuelle l'hétérosexualité comme norme, à l'école et ailleurs (même si cela évolue doucement). Je ne l'ai pas nié, c'est même tout mon propos de dire que si vous voulez changer cet état de fait et ce choix de la plupart des français, il faudra passer par un débat, on ne change pas les mentalités facilement.
Pour autant, on ne présentera jamais un tableau exhaustif aux enfants toutes les relations humaines possible, ce n'est pas pour ça qu'on pose comme "inacceptables" tous les possibles, je ne vous suis pas sur ce point.
Je ne m'engagerai pas maintenant sur le terrain du politiquement correct et des usage du langage, c'est encore un vaste débat mais c'en est un autre à mon sens.
Personnellement et depuis tout petit j'ai toujours vu le monde un peu à la star wars ou star trek, plein de forme de vie différentes, ce qui m'intéresse chez les autres sont surtout ce qu'ils font, pas leur apparence. ce qu'ils font en privé ne me regarde pas et j'entends que la réciproque soit vraie. En ce sens, je ne vois pas trop l'intérêt de parler d'homosexualité à des enfants de 9 ans mais plus simplement de nos principes républicains et plus humanistes et universalistes. Mais je n'ai pas d'avis tranché sur la question, un visionnage du film et quelques discussion avec des enfants pourront très bien me faire changer d'avis. d'où le besoin d'un débat ouvert.
Pour finir j'ai lu le blogBD, c'est gentil mais je ne me sens pas du tout concerné. Etant déjà athée et anarchiste je connais aussi les préjugés et les moqueries, même s'il ne me viendrai pas à l'idée de les comparer à ce que vit un homosexuel, enfin suivant le contexte où il vit...
Je continu de penser que le seul vrai combat est celui de l'humanisme et contre tel ou tel discrimination. Qu'on brule un homosexuel, je trouve ça juste ahurissant, autant que de penser que ce serait plus grave que de bruler un hetero...
Maintenant je comprends aussi qu'il faille bien commencer quelque part et attaquer les problèmes un par un. d'où malgré tout une certaine ouverture de ma part sur ces questions. mais soumise au débat :)
J'espère de pas trop vous énerver !

Denis Colombi a dit…

Même tiré du dictionnaire de l'académie française (et je me retiendrais de dire ce que je pense de cette institution), votre définition demeure une définition essentiellement statistique. Regardez dans un dictionnaire de sociologie, vous verrez que les choses sont plus compliquées.

Ce que je n'aime pas dans l'argument évolutionniste, c'est qu'il naturalise l'hétérosexualité. Or, la seule chose dont a besoin la reproduction, c'est du coït hétérosexuel, pas de l'hétérosexualité, qui désigne l'exclusivité de l'attirance pour les personnes de sexe différent (et je passe sur le fait que le sexe lui-même est une construction sociale !).

Pour le reste, je me répète, ce que je dénonce dans mon billet, c'est l'idée de faire croire qu'il est neutre de montrer des histoires entre personnes hétérosexuelles et biaisé de montrer des histoires avec des couples homosexuels.

prince2phore a dit…

http://fr.wikipedia.org/wiki/Norme

Wikipedia a besoin de contributeurs, si vous avez un peu de temps...

Bref, je ne vous comprends plus très bien. Vous dites maintenant que le sexe lui même, et non plus le genre, est une construction sociale, intéressant ! Pourriez-vous développer ?

Pour ce qui est du coït hétérosexuel simple, il suppose a minima une bisexualité non ?

Enfin s'il n'est pas neutre de montrer des histoires entre personnes hétérosexuelles, il n'est pas neutre non plus de montrer des histoires entre personnes homosexuelles, êtes-vous d'accord avec cette conclusion ?

Si c'est simplement là le propos de votre billet, nous sommes d'accord. Il n'en reste pas moins que changer la donne est une autre histoire qui ne va pas de soit, même si l'on est pas du tout homophobe !

Au passage si vous pouviez me diriger vers un bon dictionnaire français sur le net je suis preneur :)

Denis Colombi a dit…

Wikipédia est un aide-mémoire, et ne devrait jamais être utilisé autrement. Et ne faites pas non plus confiance aux dictionnaires classiques : les dico spécialisés sont ce qu'il y a de mieux. Une norme se définit en socio comme une règle prescrivant un comportement et qui fait l'objet d'une sanction (positive ou négative).

Pour ce qui est de la construction sociale du sexe, c'est l'approche de Judith Butler : attribuer un sexe à une personne est une construction sociale - en témoigne le cas des transexuels, y compris ceux qui le sont à la naissance et qu'on fait rentrer d'autorité, par une opération, dans l'un des deux sexes socialement admis.

Pour le reste, je ne peux qu'être d'accord avec ma propre conclusion. Mais à partir du moment où l'on ne peut plus se ranger derrière la pseudo "neutralité" façon Boutin, il convient de dire ce qui gêne vraiment dans le fait de montrer une histoire d'amour entre deux personnes du même sexe à de jeunes enfants. Et là, on va très vite tomber dans les arguments homophobes.

Fr. a dit…

Prince : “Pour ce qui est du coït hétérosexuel simple, il suppose a minima une bisexualité non ?”

Ah, vous n'avez pas lu la référence en premier commentaire, Elisabeth Badinter, L'un est l'autre, 1986 !

Vous êtes dans un domaine de construction sociale assez avancé avec la sexualité. Vous ne pourrez pas prouver que l'homosexualité et l'hétérosexualité diffèrent par nature sans faire entorse à des résultats déjà démontrés.

prince2phore a dit…

La situation actuelle correspond malgré tout à votre définition sociologique de la norme. Vous ne répondez toujours pas sur ce que je dis, à savoir qu'on peut très bien vouloir la changer cette norme si on la trouve injuste, mais on doit en discuter avant non ?
Quand à Judith Butler il faudra donc que je la lise pour la critiquer mais votre témoignage des trans-sexuel ne parait à première vue pas très probant.
Vous sous-entendez qu'il y a un troisième sexe socialement non admis, soit. Pour ma part je n'ai pas l'impression qu'on m'ait imposé socialement mon sexe d'homme...
Enfin je ne pense pas que se poser la question sur ce film nous range automatiquement dans le clan des homophobes. Il faudrait un jour pouvoir discuter du fond, de valeurs commune, sans tomber dans la caricature. Je suis libertaire et humaniste, liberté à chacun, mais je revendique le droit de participer à l'élaboration de la norme commune à tous. Et si l'homosexualité ne me gène en rien, je n'ai peut-être pas pour autant envie d'en faire une norme, au sens sociologique ou traditionnel du terme. Dépassionnons un peu le débat quoi.
Je redis cependant que dans le cas de ce film je n'ai pas d'avis tranché, soit il a une influence sur les enfants soit pas. S'il en a une, il serait bon de savoir laquelle avant de se prononcer non ? S'il n'en a pas, à quoi bon ce débat ?

à Fr. non je n'ai pas lu Elisabeth Badinter, c'est bien de citer mais si vous l'avez lu vous pourriez plutôt m'expliquer rapidement en quoi elle démontre quoi que ce soit en la matière, de manière définitive. je suis preneur.
Enfin je n'ai de toute façons pas dit qu'il y avait une différence de nature entre les deux, j'ai bien dis que comme le genre, la sexualité est une construction sociale, m'avez-vous bien lu ?
Il m'apparait simplement que comme nombre d'autres espèces notre reproduction se base sur un rapport hétérosexuel, c'est tout. Libre à vous d'en faire abstraction...
Et ni l'un ni l'autre ne m'a encore dis ce qu'il en ai de l'homosexualité, à savoir innée ou acquise et quand acquise de quelle manière (librement ou imposée). Pour ma part je pense en l'état que les trois situation existent et sont possibles, ce qui nous oblige à nuancer grandement nos prises de position sur la question, à mon avis.

Oh!91 a dit…

Votre article m'a été signalé par un ami. Je le trouve tout à fait pertinent, et votre coup de colère de bon aloi. Christine Boutin se montre offusquée là où précisément l'Education Nationale est en dessous de tout, et prépare au quotidien les homophobies de demain. Ne serait-ce que ça, mais combien sont-ils, ces mômes qui en collège, au lycée, découvrant leurs doutes sur leur propre sexualité, mais n'ayant confronté qu'à des représentations univoques, en arrivent à se répugner eux-même, à construire des comportements autodestructeurs, asservissant, cherchant coûte que coûte à rentrer dans un moule qui ne leur correspond pas, ou pire, pour certains d'entre eux, à se suicider. L'Education Nationale a la responsabilité de "banaliser", au minimum, l'homosexualité, et au mieux à expliciter les mécanismes de construction de la sexualité des individus. Car cacher ou stigmatiser sont de fait les deux faces de la même pièce.
Merci pour votre article.

Denis Colombi a dit…

@ prince2phore : j'aime beaucoup cette attitude qui veut que l'on réclame le droit de parler de tout, de tout discuter, qui permet, lorsque quelqu'un justement met en question une position que l'on ne veut pas révéler de lui reprocher de ne pas vouloir discuter, sans jamais expliciter ses propres positions. C'est tout ce qui sous-tend, également, le "débat" sur l'identité nationale...

Pour ce qui est de la construction sociale du sexe, pour que cette caractéristique, le sexe, soit socialement pertinente, il faut justement qu'elle soit socialement construite, autrement elle n'aurait pas d'existence sociale. Quand aux transexuels, ils témoignent qu'il ne suffit pas d'avoir des organes génitaux déterminés ou des chromosomes particuliers pour être socialement attribués à l'un ou à l'autre des sexes socialement reconnus.

On a rarement l'impression que la société nous modèle : ce n'est pas parce que je n'ai pas le sentiment qu'on m'a imposé d'aimer la SF que ce n'est pas social. Pareil pour le sexe.

Ensuite, il ne s'agit pas de faire de l'homosexualité une norme, mais plutôt de faire en sorte que l'hétérosexualité n'en soit plus une. Et c'est complétement différent. Vous avez déjà rencontré un militant homosexuel qui vous explique que l'homosexualité est supérieure et que tout le monde devrait être homosexuel ?

@0h!91 : Merci. C'est bien là le problème, réduire les souffrances de ceux qui ne peuvent ou ne veulent se plier à la norme.

Fr. a dit…

Prince : je sais que vous n'avez pas lu Badinter, qui explique (de manière “définitive”, dans le sens où vous l'entendez) les étapes de la découverte du mode de reproduction humain, qui n'allait pas de soi. Autrement dit, la reproduction s'est construite par apprentissage, et cet apprentissage s'est accompagné, par affinité élective, d'une définition de la sexualité par les sociétés humaines.

Pour schématiser encore plus, la sexualité est le construit social plaqué sur la reproduction d'une espèce. Cette distinction entre reproduction et sexualité n'apparaît pas dans votre raisonnement, ne renversez pas l'accusation en inversant les rôles, c'est vous qui faites abstraction d'un élément de connaissance pertinent dans le débat, pas les autres.

Sur la nature de l'homosexualité, avez-vous lu la fin du billet ? Les agents sociaux sont homosexuels pour les mêmes raisons qu'ils sont hétérosexuels. Verbatim : “On devient tout autant hétérosexuel que l'on devient homosexuel. La question devient alors "qu'est-ce qui détermine la sexualité d'un individu quelqu'il soit ?". La différence est d'importance puisqu'elle revient à cesser de regarder l'homosexualité comme un écart à une norme pour s'intéresser à un processus plus général.”

Les lois de la rhétorique font que ce débat entre nous peut ne jamais se terminer, c'est pourquoi je vous conseille de lire Badinter afin de réviser votre position (ou pas), histoire de parler en toute connaissance de cause.

Ma position est : vous n'arriverez pas à démontrer ce que vous écrivez lorsque vous écrivez que “certain choisissent librement leur sexualité, cela devient alors du ressort de la culture et de choix personnel,” et que vous n'arriverez pas non plus à montrer qu'il y a une différence de nature entre sexualités homo et hétéro, si c'était l'intention de votre proposition.

Princess2phore a dit…

Bon si je résume vous sous-entendez que je suis homophobe mais pas assez bête pour le reconnaitre ouvertement et donc que j'utilise des tactiques rhétoriques pour noyer le poisson.

Je vais vous dire les choses simplement, j'aime bien votre blog, la sociologie en générale, comme toutes les sciences, dures ou molles. Essayez juste d'imaginer que je ne suis pas un homme politique et que nous ne somme pas sur un plateau de TV, je n'ai rien ni à gagner ni à perdre, de plus mon pseudo m'assure un certain anonymat sur la toile, si je discute avec vous c'est en toute sincérité et si j'exprime des doutes ou des réserves elles sont réelles.
Mais je ne note surtout que vous feintez de ne pas me comprendre depuis le début et ne répondez pas à mes interrogations.
Ne pas faire de l'homosexualité une norme mais défaire la norme de l'hétérosexualité, vous jouez sur les mots mais peu importe. A-t-on à vos yeux, si ce n'est le droit de ne pas être d'accord, au moins l'envie d'en débattre un petit pour se faire une opinion réfléchit car la question nous parait importante ?
Pour ce qui est de mon impression, je suis bien au fait de l'influence de la société sur les individus, sans pour autant croire à un déterminisme total en la matière. Je ne suis certainement pas prof de sociologie mais je connais assez bien Bourdieu, même si je suis sûr que vous me le décrirez comme has been, j'en ai retiré beaucoup pour ma part beaucoup de bénéfice.
Enfin rapidement sur les transexuels, je sais que la sociologie n'est pas une science "dure" mais je ne suis pas d'accord avec vos conclusions, ils témoignent qu'il existe des cas extrêmement rares ou le sexe ne suffit pas, certes, ce résultat n'est pas du tout généralisable à mon avis. Sinon j'aimerai bien que vous m'expliquiez en détails votre raisonnement.
Et j'attends toujours sincèrement que vous me donniez votre position sur l'acquisition de l'homosexualité, cela me semble central dans cette discussion.
Je sais bien qu'on trouve de tout sur internet, que vous êtes prof et que votre blog marche bien mais de grâce ne tombez ni dans la paranoïa ni dans la condescendance, je ne suis là que pour échanger des idées dans un but constructif, si je vous ai donné une impression différente vous m'en voyez désolé, mais si vous ne pouvez vous résoudre à me croire, arrêtons là tout de suite la discussion, je comprendrai.

et je continuerai de lire votre blog, ne vous inquiétez pas !

Denis Colombi a dit…

"Ne pas faire de l'homosexualité une norme mais défaire la norme de l'hétérosexualité, vous jouez sur les mots mais peu importe." Non, justement, c'est complétement différent, et c'est vous, depuis le début, qui essayait d'introduire un débat pour savoir s'il faut ou non pousser les gens à devenir homosexuel... Alors que ce n'est pas le sujet ! Je ne sais pas quel est votre intérêt à cela, et ça n'a aucune importance. Je m'en tiens à ce que vous dites.

Actuellement, l'hétérosexualité est une norme au sens sociologique, non pas parce qu'elle est quantitativement dominante, mais parce que celui qui ne s'y conforme reçoit différentes sanctions négatives. Défaire cette norme, ce n'est pas faire de l'homosexualité une norme, mais faire en sorte que la sexualité ne soit plus une dimension par laquelle on juge et classe les individus. Ce serait le cas si être homosexuel ne recevait pas plus de sanction que, disons, être blond plutôt que brun. Or, en voulant à tout prix discuter de la simple représentation de l'homosexualité dans le cadre scolaire, on est en train de sanctionner celle-ci... Ai-je le droit de critiquer une question manifestement mal posée sans que l'on vienne m'expliquer que je refuse le débat ?

Pour ce qui est des transexuels, commençons par dire que la distinction science "dure"/"molle" n'a strictement aucune pertinence, et encore moins ici. Si je construit un modèle scientifique, quelque soit le domaine, il doit couvrir l'ensemble des occurrences, et ne pas en laisser quelques unes qu'il ne pourrait pas expliquer. Le fait que, dans le cas des transexuels, la dimension biologique et la dimension sociale ne correspondent pas suffit à démontrer que les deux sont indépendantes dans tous les cas, et que donc l'attribution d'un sexe à un individu implique une construction sociale, même lorsque ce sexe "correspond" à ses organes génitaux. Ce qui est confirmé par le fait que l'on considère dans tous les cas cette dimension biologique comme socialement pertinente ("arrête de pleurer, les garçons, ça pleure pas").

Pour ce qui est de ma position sur l'acquisition de l'homosexualité, je me suis déjà exprimé assez clairement dans mon billet : la question est mal posée. On acquiert l'homosexualité comme on acquiert l'hétérosexualité. Après, pour savoir si cela est génétique ou social ou psychologique, cela n'a aucune importance dans la discussion.

prince2phore a dit…

Bon alors rapidement pour la simple raison qu'on est pas sur un forum et que je n'ai pas envie que la discussion s'éternise sous forme de commentaires (d'ailleurs avez-vous un forum pour ce genre de débat à me recommander ?).

Il me semble vraiment que certain a priori vous font mal me lire, ou bien je dois mal me faire comprendre, bref je vais reprendre pour une dernière fois.

@Fr, je ne pense pas comme vous le dites avoir fait abstraction de la distinction entre sexualité et reproduction, je nie juste que les deux soit absolument indépendant.
Je n'ai jamais voulu démontrer quoique ce soit, surtout pas qu'il y ait une différence de nature entre homo et hetero sexualité, il me semble avoir bien préciser que pour moi aussi (et je me reconnais dans ce que vous dites de badinter sans en tirer les mêmes conclusions) cela relève de la même chose, la sexualité, point.
Quand à choisir librement sa sexualité, ce n'est qu'une hypothèse que j'ai émise, lisez-moi bien svp. Vous avez la critique facile et légère mais je n'entends toujours aucune réponse à mes questions...

@denis
comme je ne veux pas une énième fois me répéter et que vous semblez ne pas pouvoir entendre mes questions (vous déformer mes propos et ne répondez pas à mes questions), je vais reposer clairement mes interrogations.

- Le fait qu'un cas (transexualité) montre que la dimension sociale et biologique peuvent être dissocié ne démontre logiquement pas que les deux dimensions soient pour autant INDEPENDANTE dans TOUS les cas. c'est de la logique de base ou j'y perd mon booléen...
- Dire que l'acquisition de la sexualité (génétique, sociale ou physiologique) n'a aucune importance dans ce débat est juste incroyable. je ne sais pas si vous vous rendez bien compte de l'impact sur ce que vous dites ? êtes-vous sérieux sur ce point ?

Il apparait peu probable de toutes façons que quelque comportement que ce soit soit dicté à 100% par nos gènes, il s'agit toujours d'un mixe en patrimoine génétique et environnement.

Je reviens une dernière fois sur mes questions première dans l'espoir que vous les entendiez, étant que je ne sus pas un représentant de l'homophobie oeuvrant dans l'ombre et que j'essaye de toute mes forces de rester courtois malgré le ton décidément hostile que vous m'opposez depuis le début (pourtant je suis quelqu'un de très sympathique...)

- Est-ce à l'école de traiter de ces problèmes (discriminations), est-elle efficace pour le faire ?
- Quel âge est le plus approprié pour aborder ces questions avec des enfants ?
- Comment acquiert-on sa sexualité ? L'environnement culturel et l'éducation jouent-ils un rôle ?
- Abandonner la norme hétérosexuelle et donc faire de la sexualité un comportement neutre est-il la seule solution pour lutter contre l'homophobie (j'ai bien compris qu'il ne s'agit pas de faire de l'homosexualité la nouvelle norme...)? est-ce réalisable ? quel impact pour une société ? est-ce l'avenir humaniste indépassable ou peut-on on discuter sans être taxé d'homophobe ?

(suite dans le prochaine commentaire, limite à 4096 characters)

prince2phore a dit…

Je ne pense pas que se poser ces questions relève de l'homophobie. Je ne pense pas que vous ayez même commencé à répondre à une d'entre elle. Vous vous efforcer depuis le début de me catégoriser en homophobe et de m'attaquer en déformant mes propos sur des positions que nous partageons par ailleurs.

Je ne pense pas qu'il existe une sexualité normal et une anormal.
Je pense qu'en dehors de tout déterminisme social ou biologique il est possible de choisir sa sexualité et l'histoire nous montre que des société ont pu en la matière opté pour des choix différents des nôtres.
En humaniste je pense que chacun doit être libre de pratiquer la sexualité de son choix, qu'il s'agisse d'un choix libre ou du résultat d'un déterminisme, peut importe.
Pour ce qui est de la société par contre, il m'apparait légitime de se poser la question de la nécessité d'une norme, sans présumer nullement de la conclusion des débats.
Pour ce qui est des enfants et en l'état de notre société, étant aussi parent, je ne suis pas aujourd'hui persuadé, surtout pas par vos propos, que ce soit à l'école d'entamer le changement sans débat préalable.
Je trouve vos remarques sur la propagande existante pour l'hétérosexualité au mieux amusantes, en tout cas provocatrice.
J'imagine bien qu'avec une telle réponse vous n'allez peut-être pas publié ce commentaire ou vouloir clore ce débat. ce n'est pas grave, je vous ai dis mon sentiment à ce sujet dans mon précédent commentaire.
Je retiendrai en tout cas de ce mini débat les apports de badinter et Judith Butler que je ne manquerai pas de lire suivant vos conseils (j'ai commencé pour butler). Malgré tout et après m'être un peu renseigné sur le sujet, il ne m'apparait pas qu'elles fassent autorité au sens scientifique et définitif que vous entendez, mais je suis toujours preneur.

Sur ce je retourne discuter paisiblement sur philoforum avec des personnes qui j'ai l'impression on un peu plus l'habitude de débattre avec des gens qui ne partagent pas leur vues sur un sujet. je vous invite d'ailleurs à nous rejoindre, je compte y créer un fil sur ce sujet afin d'approfondir la question et voir du coté de la philosophie s'il existe des éléments de réponse.

bien cordialement malgré tout.

Denis Colombi a dit…

Réglons la question du "débat sur le débat (ou sur la forme du débat)" : la seule chose qui me dérange dans votre façon de débattre, c'est que vous vous posez trop facilement en victime, soit de ceux qui ne veulent pas débattre, soit de ceux qui ne veulent pas répondre à vos questions comme vous l'entendez. Voilà. Revenons aux choses sérieuses.

Sur la transexualité : prenons un autre cas : le fait que l'on puisse considérer comme déviant quelqu'un qui n'a pas commis d'acte déviant suffit à montrer que la déviance n'est pas une qualité d'un acte mais le résultat d'un étiquettage. C'est la même chose pour la construction sociale du sexe.

Pour ce qui est de la question du développement de la séxualité, je maintiens que cela n'a aucune importance dans CE débat. Il suffit de tenir en compte qu'elle n'a pas une origine différente que l'hétérosexualité. La question n'est pas de savoir comment les différentes sexualités se développent, mais de savoir s'il en existe une que l'on peut considérer supérieure à l'autre.

Ensuite, vous posez certaines de vos questions pour la première fois, comme celles sur l'école. Je me bornerais à répéter ce qui est dans mon billet : l'école parle déjà de sexualité aux très jeunes enfants, puisqu'elle leur présente des couples hétérosexuels. Donc il ne devrait pas y avoir de problème à montrer des couples homosexuels, sauf à considérer que celle-ci est inférieure à la première. Ce qui l'hypothèse implicite, la majeure non-explicitée, du raisonnement.

Pour le reste, vous réfléchissez comme si la société était une entité à part, avec ses propres besoins - en témoigne le cas où vous parlez du choix de la sexualité, où l'on ne sait pas si vous parler de choix des individus (auquel cas c'est simplement faux) ou du choix de "la société". Si vous parlez d'humanisme (mais je n'aime pas ce genre de mot beaucoup trop ronflant), je pense l'être beaucoup plus que vous en me préoccupant des individus avant de me préoccuper d'une soi-disante entité supérieure avec ses propres besoins.

prince2phore a dit…

Juste un mot sur les individus, il m'apparait justement que chaque enfant a son propre rythme de développement et je ne suis pas persuadé qu'aborder ces questions avec tous les enfants d'une même classe d'âge mais à un stade différent de leur développement soit une bonne chose.
- Peut-être certains enfant n'ont pas encore envie d'en parler ou ne sont pas réceptif.
- Il m'apparait surtout que c'est le rôle premier des parents, et donc pour ma part je souhaite aborder ces sujets avec mon fils au moment approprié et ne pas être concurrencer dans mon éducation par l'école, ce n'est tout simplement pas le rôle que je lui assigne.

Je suis bien d'accord qu'humanisme peut apparaitre un peu ronflant mais sans tomber dans "le mien est plus gros que le tiens", j'y faisais référence dans le sens où pour moi ces questions de discriminations sont solubles dans l'humanisme. Je ne suis pas féministe, ni anti-raciste ou que que soit, à partir du moment où je suis humaniste cela va de soit. Je comprends et supporte les combats des associations dédiées par nature à des problématiques circonscrites mais je pense que ces combats devraient tous être menés au nom de l'humanisme, en tout cas la vision que j'en ai l'autorise.

Pour finir une dernière remarque, il ne me semble pas qu'il soit absolument nécessaire de hiérarchiser des comportements si on souhaite juste exprimer des préférences. Je ne pense pas que dire bonjour dans la rue à un inconnu soit supérieur à un simple sourire ou à l'ignorance, j'ai une préférence, c'est tout.
que l'on reconnaisse une préférence commune et normée dans la société ne me dérange pas et n'implique en rien dans mon un sentiment de supériorité.
Mais le point cruciale reste vraiment qu'il appartient à mon avis aux parent d'éduquer leurs enfants. Je sais bien que tous ne sont pas humanistes mais il n'appartiens pas à l'école de sauver les enfants de l'éducation de leur parents...

Pour conclure sur une note d'ouverture, il serait peut-être aussi pertinent de demander leur avis aux premiers intéressés, ce serait de nature à me faire changer d'avis plus que tout discours idéologique à mon avis :)

Denis Colombi a dit…

Je pense que l'on pourra finir là-dessus : vous dites ne pas vouloir que l'école aborde ce genre de problématique avec votre fils ; pourtant, de fait, parce qu'elle lui donne à voir des relations hétérosexuelles à l'exclusion de relations homosexuelles, l'école est déjà en train d'aborder ce genre de problématique ! Et c'est tout le propos de mon post.

Fr. a dit…

Quelques observations en plus :

- Le débat sur ce post s'est construit de manière typique du point de vue de la sociologie des sciences. Karl Mannheim avait déjà identifié l'opposition entre le point de vue individualiste-rationnel, entretenu par la Révolution française, et celui, conservateur, de la contre-Révolution allemande et des romantiques comme Goethe ou Herder. Le texte s'intitule "Conservative Style of Scientific Thought" ou qqchose comme ça.

- J'ai habité l'été dernier avec un chanteur gay afro-caribéen à Londres, et lui avais posé la question : “When did you realise you were gay? — Always knew it.” Mais il est “resté” hétérosexuel une grande partie de… son enfance et sa scolarité, là où les institutions sont les plus contraignantes. Margaret Thatcher était d'accord avec vous, Prince, la cellule familiale est l'unité de base de la société, l'école n'a pas à intervenir contre l'autorité parentale.

Les deux observations ne permettent pas de stigmatiser une position contre l'autre – l'observation 1 définit Denis comme le discutant conservateur, et l'observation 2 définit Prince comme le discutant (néo-)conservateur. Ces débats ont déjà été menés sous d'autres formes. Mais sur le pouvoir d'influence du système scolaire auprès des préfs. sexuelles des individus, les deux points de vue devraient se rejoindre.

prince2phore a dit…

Je sais bien qu'en l'état l'hétérosexualité est la norme et que cela passe déjà et aussi par l'école. Je redis bien que je ne suis vraiment pas opposé a priori à ce genre de démarche et d'ouverture, ce n'est pas une feinte de ma part.
Depuis le début je réclame simplement le droit d'en débattre, d'y réfléchir, pour certainement dans mon cas finir par être d'accord avec vous, mais il est important pour moi d'approfondir la réflexion avant d'entreprendre ce genre de changement.
Il me semble qu'il en va de même pour beaucoup de parents, et attaquer de genre de débat de façon frontale de sera à mon avis pas productif.
Une mise en situation, un bon petit débat avec profs, scientifiques ou spécialistes, élève et parents et je suis sûr que la plupart des mes interrogations seront comblées.

Pas mécontent d'arriver à la fin de cet échange ceci dit, je vais maintenant pouvoir m'atteler à la tache de lire les auteurs que vous avez décrit comme incontournable.

J'espère avoir cependant levé quelque interrogations chez vous comme vous avez pu le faire chez moi lorsque vos remarques était pertinentes.

Ce fut aussi assez amusant de se faire traiter d'homophobe et de néo-conservateurs, ça ne m'arrive vraiment pas tous les jours !

bien cordialement.

Denis Colombi a dit…

Juste pour clarifier les choses : à aucun moment je n'ai dit que vous étiez homophobe.

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