François Dubet, seul sociologue du groupe d'expert qui a rédigé les programmes de SES de seconde dont j'ai déjà parlé ici, vient de donner sa démission du dit groupe. Sa lettre de démission est publiée ici. Il évoque notamment l'activité du cabinet du ministère et la place insuffisante de la sociologie. Cette démission traduit un malaise profond quant au déséquilibre entre sociologie et économie, à la faveur de la seconde, que la réforme du lycée semble annoncer.
François Dubet évoque d'abord les conditions dans lesquelles a travaillé le groupe d'expert :
Ce dernier point est particulièrement important : l'Apses, représenté dans le groupe par son président Sylvain David, avait déjà évoqué l'intervention du ministère dans le travail de ce groupe. François Dubet semble la confirmer, même s'il reste à connaître la nature exacte - mais le sociologue précisera peut-être plus tard. Dans tous les cas, cette entorse à l'indépendance qui devrait être celle des rédacteurs des programmes est très préoccupante, et mérite des éclaircissements urgents.
François Dubet évoque ensuite la place de la sociologie :
Espérons que cette démission servira à faire comprendre qu'il est essentiel que la sociologie retrouve sa place dans les SES, non pas comme un simple "supplément d'âme" à l'économie, mais bien comme une discipline centrale qui aident les élèves à devenir de meilleurs citoyens et de futurs étudiants. Parce qu'elle leur permet, par exemple sur l'entreprise, de percevoir des choses que l'économie ne saisit pas - et vice-versa. Je l'ai déjà dit, enseigner l'économie et la sociologie ensemble est la chose la plus pertinente que l'on peut faire dans une perspective de formation générale - et enseigner l'économie et la gestion est la chose la plus pertinente que l'on peut dans une perspective de formation technologique. Pour l'intérêt des élèves, il est essentiel que ces spécificités soient maintenus.
Je ne sais pas s'il me lira, mais j'aimerais quand même remercié François Dubet d'avoir eu le courage de dire cela, de démissionner pour donner un signe fort quant à la place que la sociologie doit occuper dans le secondaire. Si d'autres économistes sont satisfait par les programmes de seconde, ce n'est pas une raison pour en oublier les autres sciences.
Edit : A lire aussi, le point de vue de Pierre Maura.
François Dubet évoque d'abord les conditions dans lesquelles a travaillé le groupe d'expert :
Sans doute, les réactions de certaines associations professionnelles d'enseignants de SES sont-elles très excessives. Mais il est vrai que si nous avons travaillé sérieusement et dans un climat apaisé, nous avons travaillé très vite, nous n'avons eu le temps de consulter personne et le Cabinet du ministère a sensiblement transformé notre projet.
Ce dernier point est particulièrement important : l'Apses, représenté dans le groupe par son président Sylvain David, avait déjà évoqué l'intervention du ministère dans le travail de ce groupe. François Dubet semble la confirmer, même s'il reste à connaître la nature exacte - mais le sociologue précisera peut-être plus tard. Dans tous les cas, cette entorse à l'indépendance qui devrait être celle des rédacteurs des programmes est très préoccupante, et mérite des éclaircissements urgents.
François Dubet évoque ensuite la place de la sociologie :
J'ai le sentiment que la perspective sociologique en ressort très appauvrie. Je ne peux évidemment pas cautionner ce rétrécissement, non par corporatisme disciplinaire, mais parce que je suis convaincu de ce que les sciences sociales participent à la formation d'un citoyen éclairé tout en préparant à des études supérieures et à des activités professionnelles.Je regrette que le projet de mêler les approches économiques et sociologiques sur les mêmes objets ait été très affaibli. Par exemple, l'entreprise apparait moins comme un monde du travail, comme un monde social, que sous la forme d'une unité de production plus ou moins adaptée à des environnement mouvants.
Espérons que cette démission servira à faire comprendre qu'il est essentiel que la sociologie retrouve sa place dans les SES, non pas comme un simple "supplément d'âme" à l'économie, mais bien comme une discipline centrale qui aident les élèves à devenir de meilleurs citoyens et de futurs étudiants. Parce qu'elle leur permet, par exemple sur l'entreprise, de percevoir des choses que l'économie ne saisit pas - et vice-versa. Je l'ai déjà dit, enseigner l'économie et la sociologie ensemble est la chose la plus pertinente que l'on peut faire dans une perspective de formation générale - et enseigner l'économie et la gestion est la chose la plus pertinente que l'on peut dans une perspective de formation technologique. Pour l'intérêt des élèves, il est essentiel que ces spécificités soient maintenus.
Je ne sais pas s'il me lira, mais j'aimerais quand même remercié François Dubet d'avoir eu le courage de dire cela, de démissionner pour donner un signe fort quant à la place que la sociologie doit occuper dans le secondaire. Si d'autres économistes sont satisfait par les programmes de seconde, ce n'est pas une raison pour en oublier les autres sciences.
Edit : A lire aussi, le point de vue de Pierre Maura.
3 commentaires:
Dommage que la responsabilité de l'Apses ne soit même pas mentionnée ici alors que notre (seule) association professionnelle est l'élément déclencheur de sa démission... je l'explique sur mon blog si vous voulez en savoir plus.
L'élément déclencheur, tu y vas fort ! (entre collègues, on se tutoie non ?) Mon post a été écrit avant les articles du café pédagogique que tu cites. J'ai donc repris dans la lettre de démission ce qui me semblait le plus important par rapport au sujet de ce blog, c'est-à-dire la sociologie. Mais si les protestations de l'Apses ont visiblement participer à la décision de François Dubet, il ne faut pas non plus oublier les autres causes qu'il évoque : après tout, il renvoie vraiment dos à dos ministère et association professionnelle.
Par élément déclencheur je voulais dire que c'est parce que l'Apses s'est mise à diaboliser le programme et à agiter le chiffon rouge que Dubet a démissionné. Il l'a fait après la publication officielle du programme alors qu'il aurait pu se désolidariser plus tôt du groupe d'expert. Il a voulu éviter d'être pris dans une polémique où toutes les parties ont leur responsabilité : le ministère d'avoir mal organisé la rédaction du programme, l'Apses d'avoir de mauvais arguments (celui sur la faible place de la sociologie en est un bon) et de mauvaises pratiques (le chantage du boycott c'est pas très sérieux). Tu as bien souligné les défauts du programme que l'on peut encore corriger sans le récuser totalement.
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