Près d'un jeune sur trois voudrait bien qu'on arrête avec les sondages idiots

Un sondage tombe toujours comme un arbre dans la forêt : il ne fait du bruit que s'il y a quelqu'un pour l'entendre. Le problème, comme le fait remarquer Terry Pratchett, c'est qu'il y a toujours quelqu'un : habitants de la forêt, animaux, insectes, parasites et autres. En matière de sondage, on a l'équivalent : hommes politiques, commentateurs et éditorialistes peu scrupuleux, chroniqueurs divers... Nul doute qu'ils vont se repaître avec gourmandise pour les années à venir de ce nouveau résultat : "près d'un jeune sur trois souhaite être fonctionnaire".

Il ne reste plus qu'à s'assoir et à attendre patiemment le début de la rumeur, puis de la curée, des commentaires culturalistes qui vont s'appuyer sur un tel chiffre - qui perdra bien assez vite son origine pour devenir une vérité tenant d'elle-même - pour nous expliquer que, décidément, la France a un problème avec les entreprises, que les jeunes Français manquent de cette volonté d'entreprendre, cet esprit d'initiative, cette disposition générale de l'entrepreneur seul contre tous, debout au bord d'une falaise avec le vent dans les cheveux qui seule pourrait nous sauver des Chinois qui vont nous bouffer. Ce n'est pas la première fois : il y a peu de temps encore, on pouvait entendre dire, sans savoir d'où cela venait, que 75% des jeunes voulaient devenir fonctionnaire. Ce ne sera pas la dernière. Il faut malheureusement reconnaître que la répétition d'une même farce finit par avoir quelque chose de tragique.

Il suffit, pour se convaincre que c'est là le destin qui attend ce chiffre, de lire un peu plus l'article du Monde que je prends en référence. Son titre est clair : "Près d'un jeune sur trois souhaite devenir fonctionnaire". Mais lorsque l'on lit un peu plus avant, on tombe sur ceci :

La proportion de jeunes attirés par le statut de salarié du privé est également nettement plus marquée que la moyenne (27%, + 8 points), tout comme celle de ceux qui se verraient bien en travailleurs indépendants (24%, + 4 points), précise ce sondage effectué selon la méthode des quotas auprès d’un échantillon de 1139 personnes représentatifs de la population française âgée de 18 ans et plus.

Pourquoi l'auteur de l'article n'a-t-il donc pas titré "Un jeune sur quatre souhaite travailler dans le privé" ou "Près d'un jeune sur quatre voudrait devenir travailleur indépendant" ? Si l'on fait mine de prendre au sérieux ce sondage, ce sont là des résultats tout aussi significatifs et importants. La différence avec la moyenne nationale est même plus marquée pour ceux qui veulent travailler dans le privé que pour ceux qui veulent rejoindre les rangs des fonctionnaires ("+ 4 points par rapport à la moyenne nationale" nous précise l'article).

C'est donc que ce résultat s'inscrit dans un cadre idéologique bien particulier qui, soit par l'intention consciente du commentateur, soit par le poids que font peser les débats passés sur l'écriture présente, pousse à privilégier cette information là sur les autres. Les autres commentaires suivront, dans les colonnes du Figaro ou dans la bouche d'Alain-Gérard Slama et consorts, pour expliciter ce qui n'est ici qu'implicite : que tant de jeunes veuillent perdre leur vie à devenir fonctionnaire est un problème pour la France.

Il y a quelque chose d'admirable dans la capacité qu'a le débat public à brasser ainsi du vent. Car c'est bien ce que fait ce sondage : agiter, avec une force et une conviction peu commune, de l'air. Je l'ai dit précédemment : le plus gros problème avec le sondage n'est pas dans leur méthodologie mais dans la capacité de ceux qui les commentent à les interpréter. Ceux-là se laissent prendre par un piège positiviste qui prêtent une objectivité et une évidence au chiffre en tant que tel : un sondage dit forcément quelque chose puisque c'est un chiffre ! Et un chiffre, c'est simple à lire ! Pourtant ce chiffre de 30% des jeunes souhaitant devenir fonctionnaire ne nous dit strictement rien.

En effet, qu'est-ce que que cette question "Dans l’idéal,vous souhaiteriez être / auriez aimé être …? (une seule réponse possible)" avec comme proposition de réponse "Fonctionnaire ; Travailleur indépendant (comme artisan, commerçant...) ; Salarié du privé ; Profession libérale ; Homme/Femme au foyer ; Ne se prononce pas". Que veut dire fonctionnaire ? La fonction publique est malheureusement pour les sondeurs quelque chose de vaste et de complexe : à peine quelques millions de membres... Et les représentations de ce qu'est un fonctionnaire ne sont pas simples : on y confond facilement la fonction publique territoriale et d'Etat, les contractuels et les titulaires, les différentes catégories, etc.

Que peut donc vouloir dire ce terme pour les répondants ? Sans doute des choses très différentes : certains ont en tête un poste précis, et auraient souhaité devenir enseignant ou conservateur du patrimoine ou professeur au Collège de France ou facteur, d'autres n'y attache que l'idée que c'est un emploi de bureau, éloigné des difficultés du travail ouvrier auquel ils ont pu être confronté - les jeunes interviewés par Stéphane Beaud par exemple -, d'autres encore ne doivent y voir qu'un poste tranquille et protégé et hésiteraient peut-être si on leur proposait de devenir militaire ou policier... Bref, on agrège ici des réponses qui ont des origines tellement différentes, des raisons, des justifications et des causes qui sont si diverses, que l'on ne peut strictement rien en dire : impossible d'en inférer, par exemple, un refus de la concurrence ou une paresse bien française, car certains espèrent trouver dans la fonction publique un travail qui fasse sens pour eux et d'autres seront attirés par les postes de pouvoir... Aucun commentaire n'est possible. C'est la conclusion à laquelle devrait parvenir toute personne qui se pencherait un peu sur ce chiffre.

Il aurait été possible pourtant d'avoir des informations plus précises, soit en posant une série de questions sur les préférences des individus en matière d'emploi ("préféreriez-vous un salaire élevé ou un faible risque de perdre votre emploi ?", "Quelle est la caractéristique de l'emploi qui est la plus importante pour vous ?", etc.), soit en proposant une liste d'emplois divers et en demandant aux enquêtés de les classer en fonction de leurs préférences. Mais tout cela prends du temps, en conception et en analyse. Et pour cela, ni les instituts de sondages ni ceux qui consomment leurs produits jusqu'à plus soif n'y sont bien disposé.

En soi, ce sondage n'est pas sans intérêt. Mais il nous apprends plus de choses sur ceux qui l'ont commandé, conçu et commenté, et sur tous ceux qui à l'avenir l'utiliserons, que sur la population et les phénomènes qu'il prétend mettre en lumière. Il nous dit beaucoup de l'allant-de-soi concernant les problématiques de l'emploi et du travail en France. Le sondage prétend "appréhender l’image que les Français, et plus particulièrement les premiers concernés à savoir les 18-24 ans, ont de la situation professionnelle des jeunes". Mais cette situation professionnelle se résume en fait à des questions sur l'emploi : ni sur le contenu du travail, ni sur les conditions de celui-ci. la question privilégié est celle de l'obtention d'un emploi, et les questions tournent essentiellement autour de l'optimisme ou du pessimisme des jeunes.

C'est dans ce cadre-là que l'on peut mieux comprendre le sens de l'échelle proposée dans le sondage "Fonctionnaire ; Travailleur indépendant (comme artisan, commerçant...) ; Salarié du privé ; Profession libérale ; Homme/Femme au foyer ; Ne se prononce pas". Ce que doit mesurer, dans l'esprit de ceux qui ont fait le sondage, cette échelle est très probablement le risque et l'optimisme des jeunes, - "Fonctionnaire" constituant, semble-t-il, le degré le plus bas. L'interprétation est presque déjà écrite donc. La curée peut commencer.
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"Marx likes it"

Sociological Images me rappelle que c'est l'anniversaire de papy Karl. Alors oui, je n'ai pas fait ceux de Durkeim, Weber ou Simmel sur ce blog. Mais je ne peux résister au plaisir de partager cette photo récemment prise non loin de chez moi.


Difficile de dire si la figure de Marx et le "Marx aime ça" sont l’œuvre de la même personne. Il est possible que le texte et la main soient un ajout au pochoir du barbu. Voilà en tout cas un graffiti qui organise la rencontre entre le mur réel et le mur virtuel, celui de Facebook d'où est tiré - est-il besoin de le rappeler - le "aime ça/likes it".

D'ailleurs, ce n'est pas la seule mention de cette expression sur un mur "analogique" que j'ai trouvé. Etant retourné dans les toilettes que j'ai très modestement contribué à rendre célèbre (pour des toilettes, hein...), j'ai pu prendre cette nouvelle photo :


Le dialogue a donc continué, et cette mention du "j'aime", accompagné du dessin sans ambiguïté du fameux pouce levé, s'est tout naturellement inséré dans la conversation. Alors, contamination du réel par le virtuel ? Pas vraiment : ce serait plus un échange, Facebook ayant bien emprunté l'idée de mur/wall comme lieu d'expression publique ou semi-publique au graffiti et au street art.

On peut filer la métaphore : qu'est-ce que ce mur sinon une forme de troll, dans le sens qui a été donné à ce mot sur Internet ? Après tout, Wikipédia, qui ne peut qu'être une référence extrêmement légitime sur ce sujet, définit ainsi le troll :

Un troll est une action de nature à créer une polémique en provoquant les participants d’un espace de discussion (de type forum, newsgroup ou wiki) sur un réseau informatique, notamment Internet et Usenet. Le mot désigne également un utilisateur qui a recours à ce type d’action.

Par métonymie, on parle de troll pour un message dont le caractère est susceptible de générer des polémiques ou est excessivement provocateur, ou auquel on ne veut pas répondre et que l’on tente de discréditer en le nommant ainsi.

Certains messages laissés sur des murs bien réels s'apparentent bien à ce type d'attitude. En témoigne celui-ci, toujours tiré du même affrontement, que je soupçonne d'être la réponse de l'auteur du message originel qui appelait déjà de ses vœux une nouvelle commune :


Cela permet de comprendre que ce n'est pas Internet qui a fait naître une pratique comme celle du troll. C'est bien plutôt une forme particulière de dialogue qui conduit à ce genre de réaction. Non pas tellement, comme on pourrait a priori le penser, l'anonymat que partagent le graffiteur avec le posteur, mais plutôt la multiplicité des intervenants et des spectateurs. Dans un tel contexte, la principale difficulté est d'obtenir une réaction des autres : le fameux "I like it" que partagent ici mondes réel et virtuel (bien que cette distinction n'est pas vraiment de sens...). Rien n'est pire qu'un message sans réponse. Dès lors, pour obtenir en fait une forme de validation qu'est la réponse, le troll devient une solution viable.

Une fois de plus, le débat politique plus classique n'est pas éloigné de cela. Là aussi, il faut conquérir une existence au travers des réactions des autres, médias ou politiques. Là aussi, les mêmes stratégies, petites phrases chocs et provocations, ont le même rendement. Dès lors, on ne devrait pas s'étonner que ce soit les meilleurs trolleurs que l'on entendent le plus. Une fois de plus, la forme même du dialogue y contribue, sans tout expliquer. On ferait sans doute bien d'y réfléchir.
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Le problème dans la cuisine

Une vigilante lectrice m'a fait part de son énervement devant une des nombreuses publicités sexistes qui émaillent notre quotidien. Elle a bien raison : l'objet d'une délit est en effet superbe dans son genre. Surtout qu'il me permet de faire quelques réflexions sur l'évolution des représentations de la femme, et sur la place des hommes.


Voici donc une publicité pour une grande marque de cuisine, accompagnée de son slogan "la recette du bonheur". A chaque fois qu'une slogan aussi manifestement nul est utilisé, un diplômé d'école de commerce gagne sa place au paradis.

Une femme donc bien sûr. Mais attention : pas une femme qui se contente de faire la cuisine. Non bien sûr, nous sommes au XXIème siècle quand même, et il est quand même arrivé aux oreilles de certains publicitaires que les femmes n'avaient plus tellement envie qu'on les cantonne à faire la popote en attendant que le chéri revienne avec son attaché-case à la main. Donc une femme qui visiblement travaille. Surfe sur Internet. Fait la cuisine. Et, quand même, s'occupe du gosse parce qu'il faut pas déconner, faut bien que quelqu'un se le cogne le chiard.

Et cette femme, elle est vachement forte parce que, wahou, elle y arrive. Bon, ok, elle est aidée par la super-cuisine de la mort qui tue qu'à tout les coups, tu y met un poulet vivant dans le four, il en sort un magret de canard au miel pommes salardaises. Mais quand même elle assure.

En sociologie, on parle de "double journée des femmes". Ou comment celles-ci, si elles ont pu conquérir le monde du travail, n'ont vu ces responsabilités ne faire que s'ajouter à ce qu'elles avaient déjà. L'injustice ménagère fait que, revenues à la maison, elles peuvent commencer leur deuxième journée, en plus de celle du travail. On y ajoute aussi généralement la "charge mentale" : même si l'homme participe aux tâches ménagères, il est courant que ce soit à la femme que soit dévolue la responsabilité d'organiser, planifier et contrôler les dites tâches. Et on sait, depuis Jean-Claude Kaufmann, que les hommes, même s'ils sont des gros geeks qui t'installent la dernière version de Linux tout en roxant du noobs sur WOW, sont biens démunis quand il s'agit de s'y retrouver dans les trois programmes de lavage du lave-linge. La "tactique du mauvais élève" qu'on appelle ça : ils voudraient bien, mais ils y arrivent pas, jusqu'au moment où le professeur craque et fait les choses lui-même.

Mais au-delà de cela, on peut aussi voir dans cette publicité une modification de la femme idéale. A l'idéal traditionnel de la féminité se sont ajoutées certaines caractéristiques jadis réservées à la masculinité : l'activité, le travail, l'initiative, l'informatique même ici... Mais il est notable que les incitations s'ajoutent et ne s'annulent pas : loin d'avoir étendu le choix des femmes, cela a surtout contribué à empiler quelques obligations dans une liste déjà longue. Cela provient en grande partie du fait que ce qui est attaché à la masculinité demeure dominant dans nos sociétés et que ce qui est attaché à la féminité est dévalorisé : difficile, dès lors, d'inciter les hommes à se ruer sur des activités que les femmes désirent abandonner. Une fois de plus, le problème qu'il y a derrière tout cela, ce n'est pas seulement la femme, c'est aussi l'homme.

Ah, et pour ceux que ça intéresse, la cuisine, c'est mon domaine. Au quotidien, pas seulement quand il s'agit de se croire dans TopChef.
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Remarques en vrac sur les geeks

Vous avez sans doute déjà écouté l'émission Place de la Toile qui vient juste de se terminer sur France Culture. Si ce n'est le cas, je suis très fâché, mais je veux bien vous pardonner si vous allez la podcaster fissa. Une très belle expérience que cette participation à une émission de radio : ce fut un moment vraiment très agréable, et la discussion a été à la fois très intéressante et très amusante. Le problème, c'est bien sûr qu'on y serait bien rester des heures... Du coup, quelques réflexions en vrac sur la même thématique : la culture "geek"

Je n'avais pas pu mettre mon t-shirt de geek le jour de l'émission, alors j'en poste un aperçu ici

On n'a pas parlé du terme "geekette" : il est pourtant très intéressant, parce qu'il témoigne d'un certain sexisme bien implanté dans notre langage propre. En effet, pourquoi dire, comme l'ont fait beaucoup de magazines féminins, "une geekette" plutôt que "une geek" ? Pourquoi féminiser le mot en "-ette" alors que l'anglais originel ne voit pas l'intérêt, à raison, de genrer tout cela ? De toute évidence, on considère que geek, c'est par essence masculin, et que si ce doit être féminin, il faut le montrer de façon ostensible, i.e. les femmes sont un type particulier tandis que les hommes sont le type "standard" ou "normal" comme dirait une députée UMP. Mais encore ne marque-t-on pas cette spécificité par une simple accentuation de la syllabe finale, mais par un diminutif qui sonne comme "coquette" ou "pauvrette". De la même façon qu'on a Superman et Supergirl, on dévalorise la féminité en la renvoyant au monde du petit et de l'enfance.

On a juste évoqué les problèmes de l'importation du terme "geek" en France : il y aurait long à en dire et on ne pouvait pas tout traiter. Mais il faut bien reconnaître que le geek made in France n'est pas le geek US. Le terme doit son explosion à un travail journalistique de mobilisation du terme, sur le thème du "les geeks sont comme ci, les geeks sont comme ça". Le terme pouvait déjà exister dans certains milieux très proches de l'informatique (comme les écoles d'ingénieur) mais n'était pas aussi répandu qu'aujourd'hui. Ce sont très largement les journalistes qui ont modelé la vision la plus courante aujourd'hui du geek, contrairement aux Etats-Unis où le terme avait un ancrage scolaire et universitaire plus marquée. On pourrait faire le parallèle avec le terme "bobo" qui a connu une même importation en France. D'ailleurs, un certain Xavier de la Porte avait écrit un très bel article là-dessus dans La France invisible...

J'ai avancé l'hypothèse que les geeks ne se rencontraient pas dans n'importe quel "habitat" - plutôt urbain que rural - et pas dans n'importe quelle classe - classes supérieures plutôt que populaires : c'est peut-être un peu audacieux de ma part dans la mesure où je n'ai pas fait d'enquête là-dessus, mais il y a de bonnes raisons de le pensée. Dont celle-ci qui ne m'est venue en tête qu'après l'émission : la culture geek témoigne d'un rapport "savant" à la culture populaire. Il s'agit en effet toujours de traiter des biens culturels peu légitimes, souvent rejetés par l'école par exemple, comme pouvant s'apprécier sur le même mode que les œuvres légitimes. On fait l’exégète de Douglas Adam comme on ferait celle de Robert Musil, on acquiert une connaissance extensive de Star Trek avec le même sérieux que d'autres se plongent dans la Comédie Humaine. Et on s’enorgueillit d'en savoir plus que les autres, d'être plus fan, plus savant, plus lettré, plus connaisseur que le commun des mortels et que les autres geeks. D'où le succès de jeux comme The Unseen University Challenge qui exige une connaissance de l’œuvre de Terry Pratchett dans ses moindres recoins. Tout cela demande, il faut bien le dire, un certain capital culturel. Une raison de plus de penser que nous ne sommes pas tout égaux face à la geekitude.

Les vrais geeks éprouveront sans doute un vif besoin de nous allumer de toutes parts, nous reprochant sans doute de ne pas parler d'eux, les "vrais geeks". Qu'il me soit permis de leur répondre ici. Dans l'émission, je soutiens que la culture geek repose largement sur un modèle de distinction. Et que sont les interminables débats pour savoir ce qu'est vraiment le "vrai geek" si ce n'est une forme profonde et radicale de distinction, une façon de se poser comme plus savant, comme plus raffiné, comme plus geek que l'autre ? Être geek, ce n'est peut-être finalement pas si différent que d'être un(e) fashionisto(a) à la poursuite de la dernière tendance. Simmel analysait la mode comme la combinaison de la passion démocratique pour l'égalité et de la passion aristocratique pour la distinction. Je crois pouvoir dire sans trop me tromper qu'il aurait trop kiffé le geeks.
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