Si vous n'avez pas suivi mes aventures estivales, sachez que j'ai péché : oui, j'ai blasphémé contre le dieu Humour, celui qui pardonne tout, qui permet tout. Mon âme étant perdue, autant continuer : il est un autre dieu païen, produit de l'Internet, qui mérite que l'on s'attarde sur son cas. Et ce dieu, c'est le troll. Car on ne trouve nulle part ailleurs que dans le troll l'usage le plus systématique et le plus appuyé de l'humour comme excuse et comme justification. La "culture troll", loin de se limiter aux seuls trolleurs, inspire en fait une grande partie des relations en ligne. Et il est peut-être temps de la mettre en question.
Le troll, on le sait, est cette pratique très particulière qui consiste à poursuivre une discussion dans le seul but d'énerver les gens. Comme le dit Wikipédia :
Vous en avez sans doute déjà croisé. On peut diviser, basiquement, les trolls en deux catégories : d'un côté, les trolls "à leur corps défendant", qui s'engagent sincèrement dans un débat et sont étiquetés comme trolls par les autres soit du fait de leur comportement, soit comme moyen de les faire taire ; les trolls "professionnels", individus ou communautés qui prennent cela comme un jeu. Le but est alors d'énerver l'adversaire, de le faire sortir de ses gonds, si possibles en le choquant au maximum. C'est à cette deuxième catégorie que je vais m'intéresser ici, laissant la première de côté.
Les Inrocks ont récemment publié un article retraçant le parcours d'un de ces trolls. On y découvre le parcours d'un jeune homme, Nicolas, que la justice poursuit pour "provocation à la commission d’atteintes volontaires à la vie, d’atteintes volontaires à l’intégrité de la personne et d’agression sexuelles". Avec des amis, il s'était ainsi livré à la saine pratique de troller la page facebook où un père parlait de son fils autiste. Ce que souligne cet article, finalement, c'est que l'on a à faire à une "culture troll".
Non seulement l'activité est collective, et non individuelle, non seulement elle s'appuie sur des interactions et des échanges entre les membres d'un groupe - échanges électroniques mais aussi rencontres irl (in real life) -, mais en plus, et surtout, elle repose sur un ensemble de représentations, significations et normes partagées. Se livrant à une activité qui, par certains aspects, peut être vue comme déviante, le troll doit pouvoir fournir et se fournir une grille de lecture du monde qui lui permet de "retourner le stigmate" comme le disait Goffman. De la même façon que le fumeur de cannabis pourra donner des dizaines de bonnes raisons à sa consommation, le troll pourra justifier de toutes sortes de façons son activité : il s'agira d'expliquer que le troll sert à châtier des gens qui le mérite, les "kikoos" ou "kévin", ceux qui n'ont pas d'humour... ou dans le cas de Nicolas, un homme qui, selon lui, "exhibe" son fils. Ainsi, dans la représentation du monde partagée par ceux qui se rallient à la culture troll, on a à faire à de courageux justiciers luttant contre la bêtise du web.
Dans cette construction collective, la référence à l'humour, bien évidemment "noir" et "second degré", tient une place centrale. Elle permet en effet une double qualification : qualification des victimes du troll en responsable de leur malheur - si elles comprenaient l'humour, elles ne s'énerveraient pas, et donc ne seraient pas trollées -, qualification de soi. Cette dernière est très importante : elle permet de se convaincre que l'on ne pense pas vraiment ce que l'on dit, et que donc on est innocent, que ce n'est pas bien grave, et que l'on reste, malgré tout, un type bien. Autrement dit, elle permet de "sauver la face", comme l'aurait dit, une fois de plus, Goffman.
C'est d'ailleurs pour cela que l'une des stratégies préférées des trolls est d'accuser leur adversaire de ne "rien y connaître" (on trouvera de nombreux exemples dès qu'il s'agit de parler des jeux vidéo...) : en faisant de celui-ci un ignorant, on s'autorise plus facilement à le punir.
Mais ce qui est notable, c'est que cette culture troll n'est pas limitée aux seuls trolls professionnels. En fait, elle est assez largement répandue dans les différents acteurs qui participent à Internet : elle intervient pour minimiser l'importance des attaques de troll parce que, finalement, "c'est de l'humour". Le fameux principe "don't feed the troll" est ainsi régulièrement rappelé. Elle sert en fait à demander à ceux qui se sentent choqués par une déclaration à "laisser faire", et partant fait reposer sur leurs épaules, et non sur celles des trolls eux-mêmes, la responsabilité de la dérive d'une conversation, voire des insultes qu'ils reçoivent. Le "don't feed the troll" est l'une des meilleures armes des trolls : elle leur rappelle que la faute n'est pas de leur côté. Elle peut même se manifester dans la façon dont Facebook gère officiellement certaines affaires.
Pourtant, il arrive qu'un troll "abuse", qu'il dépasse les bornes du point de vue même des autres trolls, et cela intervient justement quand il abandonne cette légèreté qu'est censé donné l'humour et le second degré. Un bel exemple est donné dans ce récit de DC Women Kicking Ass : l'auteur y explique comment un troll l'a pourchassé et harcelé, créant des comptes différents, et faisant preuve d'une grande violence. Celui-ci, qui a poursuivi de ses insultes d'autres personnes, a été condamné assez largement.
Mais pourquoi en fait ? Il n'a finalement fait que suivre les prescriptions de la culture troll. Simplement, il les a poussé peut-être "un peu trop loin". C'est un point important lorsque l'on s'intéresse à l'application des normes que de noter qu'il est possible d'être déviant en respectant trop les normes. La femme qui joue "un peu trop" le jeu de la féminité sera ainsi considérée comme stupide - pensez aux pompoms girls dans les films/séries américaines - tout comme l'homme qui joue un peu trop le jeu de la virilité - le culturiste boeuf. Il en ira de même de l'enseignant qui pontifie "un peu trop", du trader qui flambe "un peu trop", de l'homme politique qui croit "un peu trop" à son combat... D'une façon générale, l'humour et le "second degré" occupent une place si importante dans notre culture que celui qui ne joue pas son rôle avec un minimum de distance, celui "qui s'y croit", est presque toujours considéré comme un déviant. Le cynisme est peut-être l'une de nos valeurs les plus puissantes.
Il est très important de comprendre que cette culture troll est très précisément ce qui rend possible de tels débordements : elle fournit un ensemble de justifications et de bonnes raisons d'agir à ceux qui dépassent les bornes. Le stalker, c'est-à-dire celui qui se rend coupable de harcèlement, ne fait jamais que de suivre au pied de la lettre les indications de cette culture. De la même façon que le violeur ne fait souvent que suivre au pied de la lettre les prescriptions de la patriarchie - pour ceux qui n'auraient pas vu le parallèle avec la rape culture qu'il y a derrière ce billet. Dans le témoignage recueilli par les inrocks, on peut ainsi lire :
"Bien-pensants" et "vrais méchants" ne partagent pas seulement un même modus operandi - ce qui est déjà assez grave - mais aussi une même culture, de mêmes façons de justifier leurs débordements, ne serait-ce que par le "mais les autres le font aussi". On se souviendra, bien sûr, des risques qu'il y a à rire avec n'importe qui...
La tolérance dominante aux trolls n'est pas pour rien dans la fabrique des débordements. Celle-ci se manifeste généralement par le biais de trois types d'arguments : minimisation : "ce n'est pas grave, c'est que du troll" ; normalisation : "les trolls, c'est comme les cafards, on peut pas s'en débarasser" ; retournement de la faute : "tu n'avais qu'à pas leur répondre, c'est de ta faute". La culture troll, c'est ça. Et cela vaut le coup que chacun y réfléchisse.
PS : pour ceux qui se demandent ce que fait le (1) à côté du titre, sachez que dans un prochain épisode, nous explorerons les liens entre la culture troll et le conservatisme.
Image empruntée ici |
Le troll, on le sait, est cette pratique très particulière qui consiste à poursuivre une discussion dans le seul but d'énerver les gens. Comme le dit Wikipédia :
En argot Internet, un « troll » est une personne qui participe à une discussion ou un débat (par exemple sur un forum) dans le but de susciter ou nourrir artificiellement une polémique, et plus généralement de perturber l'équilibre de la communauté concernée.
Vous en avez sans doute déjà croisé. On peut diviser, basiquement, les trolls en deux catégories : d'un côté, les trolls "à leur corps défendant", qui s'engagent sincèrement dans un débat et sont étiquetés comme trolls par les autres soit du fait de leur comportement, soit comme moyen de les faire taire ; les trolls "professionnels", individus ou communautés qui prennent cela comme un jeu. Le but est alors d'énerver l'adversaire, de le faire sortir de ses gonds, si possibles en le choquant au maximum. C'est à cette deuxième catégorie que je vais m'intéresser ici, laissant la première de côté.
Les Inrocks ont récemment publié un article retraçant le parcours d'un de ces trolls. On y découvre le parcours d'un jeune homme, Nicolas, que la justice poursuit pour "provocation à la commission d’atteintes volontaires à la vie, d’atteintes volontaires à l’intégrité de la personne et d’agression sexuelles". Avec des amis, il s'était ainsi livré à la saine pratique de troller la page facebook où un père parlait de son fils autiste. Ce que souligne cet article, finalement, c'est que l'on a à faire à une "culture troll".
“La première fois, j’avais 16 ans. J’avais adhéré à un groupe Facebook qui s’appelait “Il n’y a pas de pédophile, il n’y a que des enfants faciles”. A l’époque, mon profil Facebook était encore à mon vrai nom et correspondait à de ‘vraies’ connaissances : 99% d’entre elles ont pris la blague pédophile au sérieux. J’ai trouvé ça drôle, c’est devenu un jeu avec quelques potes.” [...]
Avec sa bande, il se met à créer des groupes Facebook aux titres provocants. Sur MSN, les potes se refilent les liens des pages Facebook “les plus foireuses“, et s’attaquent à leurs auteurs. Les soirs où il boit, Nicolas est “plus virulent“. “Nos comptes Facebook ont vite été bloqués“. Pas grave, Nicolas est déjà loin. Il s’est créé des dizaines de nouveaux profils plus fake les uns que les autres.
Non seulement l'activité est collective, et non individuelle, non seulement elle s'appuie sur des interactions et des échanges entre les membres d'un groupe - échanges électroniques mais aussi rencontres irl (in real life) -, mais en plus, et surtout, elle repose sur un ensemble de représentations, significations et normes partagées. Se livrant à une activité qui, par certains aspects, peut être vue comme déviante, le troll doit pouvoir fournir et se fournir une grille de lecture du monde qui lui permet de "retourner le stigmate" comme le disait Goffman. De la même façon que le fumeur de cannabis pourra donner des dizaines de bonnes raisons à sa consommation, le troll pourra justifier de toutes sortes de façons son activité : il s'agira d'expliquer que le troll sert à châtier des gens qui le mérite, les "kikoos" ou "kévin", ceux qui n'ont pas d'humour... ou dans le cas de Nicolas, un homme qui, selon lui, "exhibe" son fils. Ainsi, dans la représentation du monde partagée par ceux qui se rallient à la culture troll, on a à faire à de courageux justiciers luttant contre la bêtise du web.
“Les blagues ne sont pas spécialement drôles en soi ; elles cherchent surtout à faire réagir ceux qui nous prennent au sérieux, ceux qui ne comprennent pas l’humour noir.” Bref, Nicolas jure qu’il ne “pense pas un mot de ce qu’il dit” – c’est ça, le “goût de l’absurde“.
Dans cette construction collective, la référence à l'humour, bien évidemment "noir" et "second degré", tient une place centrale. Elle permet en effet une double qualification : qualification des victimes du troll en responsable de leur malheur - si elles comprenaient l'humour, elles ne s'énerveraient pas, et donc ne seraient pas trollées -, qualification de soi. Cette dernière est très importante : elle permet de se convaincre que l'on ne pense pas vraiment ce que l'on dit, et que donc on est innocent, que ce n'est pas bien grave, et que l'on reste, malgré tout, un type bien. Autrement dit, elle permet de "sauver la face", comme l'aurait dit, une fois de plus, Goffman.
C'est d'ailleurs pour cela que l'une des stratégies préférées des trolls est d'accuser leur adversaire de ne "rien y connaître" (on trouvera de nombreux exemples dès qu'il s'agit de parler des jeux vidéo...) : en faisant de celui-ci un ignorant, on s'autorise plus facilement à le punir.
Mais ce qui est notable, c'est que cette culture troll n'est pas limitée aux seuls trolls professionnels. En fait, elle est assez largement répandue dans les différents acteurs qui participent à Internet : elle intervient pour minimiser l'importance des attaques de troll parce que, finalement, "c'est de l'humour". Le fameux principe "don't feed the troll" est ainsi régulièrement rappelé. Elle sert en fait à demander à ceux qui se sentent choqués par une déclaration à "laisser faire", et partant fait reposer sur leurs épaules, et non sur celles des trolls eux-mêmes, la responsabilité de la dérive d'une conversation, voire des insultes qu'ils reçoivent. Le "don't feed the troll" est l'une des meilleures armes des trolls : elle leur rappelle que la faute n'est pas de leur côté. Elle peut même se manifester dans la façon dont Facebook gère officiellement certaines affaires.
Image empruntée ici : où l'on voit bien comment on peut blâmer les victimes... |
Pourtant, il arrive qu'un troll "abuse", qu'il dépasse les bornes du point de vue même des autres trolls, et cela intervient justement quand il abandonne cette légèreté qu'est censé donné l'humour et le second degré. Un bel exemple est donné dans ce récit de DC Women Kicking Ass : l'auteur y explique comment un troll l'a pourchassé et harcelé, créant des comptes différents, et faisant preuve d'une grande violence. Celui-ci, qui a poursuivi de ses insultes d'autres personnes, a été condamné assez largement.
Mais pourquoi en fait ? Il n'a finalement fait que suivre les prescriptions de la culture troll. Simplement, il les a poussé peut-être "un peu trop loin". C'est un point important lorsque l'on s'intéresse à l'application des normes que de noter qu'il est possible d'être déviant en respectant trop les normes. La femme qui joue "un peu trop" le jeu de la féminité sera ainsi considérée comme stupide - pensez aux pompoms girls dans les films/séries américaines - tout comme l'homme qui joue un peu trop le jeu de la virilité - le culturiste boeuf. Il en ira de même de l'enseignant qui pontifie "un peu trop", du trader qui flambe "un peu trop", de l'homme politique qui croit "un peu trop" à son combat... D'une façon générale, l'humour et le "second degré" occupent une place si importante dans notre culture que celui qui ne joue pas son rôle avec un minimum de distance, celui "qui s'y croit", est presque toujours considéré comme un déviant. Le cynisme est peut-être l'une de nos valeurs les plus puissantes.
Il est très important de comprendre que cette culture troll est très précisément ce qui rend possible de tels débordements : elle fournit un ensemble de justifications et de bonnes raisons d'agir à ceux qui dépassent les bornes. Le stalker, c'est-à-dire celui qui se rend coupable de harcèlement, ne fait jamais que de suivre au pied de la lettre les indications de cette culture. De la même façon que le violeur ne fait souvent que suivre au pied de la lettre les prescriptions de la patriarchie - pour ceux qui n'auraient pas vu le parallèle avec la rape culture qu'il y a derrière ce billet. Dans le témoignage recueilli par les inrocks, on peut ainsi lire :
Désormais troll à part entière, le garçon découvre les croisades de ses nouveaux camarades. Certains sont de vrais méchants, qui “pensent ce qu’ils disent“. “Des tarés“. Nicolas ne se met pas dans le même sac. “Moi, j’aime le décalage: dire des choses tellement grosses qu’elles ne peuvent pas être crédibles. Parce qu’en vrai, je suis plutôt un bien-pensant“.
"Bien-pensants" et "vrais méchants" ne partagent pas seulement un même modus operandi - ce qui est déjà assez grave - mais aussi une même culture, de mêmes façons de justifier leurs débordements, ne serait-ce que par le "mais les autres le font aussi". On se souviendra, bien sûr, des risques qu'il y a à rire avec n'importe qui...
La tolérance dominante aux trolls n'est pas pour rien dans la fabrique des débordements. Celle-ci se manifeste généralement par le biais de trois types d'arguments : minimisation : "ce n'est pas grave, c'est que du troll" ; normalisation : "les trolls, c'est comme les cafards, on peut pas s'en débarasser" ; retournement de la faute : "tu n'avais qu'à pas leur répondre, c'est de ta faute". La culture troll, c'est ça. Et cela vaut le coup que chacun y réfléchisse.
PS : pour ceux qui se demandent ce que fait le (1) à côté du titre, sachez que dans un prochain épisode, nous explorerons les liens entre la culture troll et le conservatisme.
J'attends le (2) avec impatience !
RépondreSupprimerQuelques coquilles corrigées au passage ;-p :
La culture trolle,... inspire
Il s'était ainsi livré
elles ne s'énerveraient pas, et donc ne seraient pas trollées
Celui-ci, qui a poursuivi de ses insultes
Dans les faits, tu traites exclusivement du troll malveillant. Or il se peut agir, comme tu le dis, d'un enthousiaste qui s'emporte ou simplement de quelqu'un qui voudrait avoir raison, si tant est qu'on imagine un troll dans un débat et pas dans un simple cas de harcèlement/bashing comme ceux ici présentés, où la volonté de nuire est évidente…
RépondreSupprimerCe que je trouve risible avec le "c'est du troll" comme excuse pour esquiver un contre-argument, c'est qu'on ne le traite pas du tout. On le laisse flotter là, on passe outre, et on s'affranchit d'y donner une réponse structurée. "Don't feed the troll", mantra sacré qui vous permet d'ignorer les critiques, puisque vous les imaginez malveillantes, et faites pour vous nuire. Or, le raisonnement tient si la critique vise bien votre malaise, puisqu'y répondre ne fera que prêter le flanc à de nouvelles attaques. Néanmoins, s'il s'agit juste de participer à la discussion, des trolls "à leur corps défendant", dont tu ne traites certes pas ici, peut-on vraiment mettre ne place les mêmes stratégies de défense ? C'est loin d'être toujours évident de voir lesquels sont dans quelles catégories. Si des gens venaient chialer sous un de tes articles que les Gender Studies c'est n'importe, que le genre n'est pas construit socialement, et que c'est tout du darwinisme biologique, je pense que nombreux seront ceux qui pesteront à la lecture du brûlot, ce qui ne nous permet malgré tout pas de supposer que le but de sa venue était de troubler la quiétude de nos parlottes. C'était sans doute sincère.
Bref ma question : dans le cas où les deux types de trolls sont indiscernables, y a-t-il vraiment des mesures qu'on puisse prendre contre cette "troll culture", sans esquiver ce qui peut être une critique fondée ?
Je pense que la règle #1 du troll est de savoir prendre les choses à la légère. C'est difficile de penser que c'est le cas de ceux qui se rendent coupables de harcèlement.
RépondreSupprimerAu final, ça tient plus de la manière de s'exprimer qu'autre chose. Les arguments les plus efficaces ne sont-ils pas concis et percutants ?
Cet article (extrêmement mal rédigé par ailleurs) est risible...
RépondreSupprimer...
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(désolé, je n'ai pas pu m'en empêcher ^^...)
Pour revenir plus sérieusement au sujet, je suis un adepte du "don't feed the troll". Et je ne pense pas que me servir de cette "philosophie" contribue en quoi que ce soit à excuser les trolls de leurs actes. Et ce, qu'ils s'agisse de trolls purement malveillants, de justiciers masqués, ou encore de ceux qui s'ennuient sur internet et qui décide de passer leur après-midi à aller remuer les communautés à droite à gauche.
Je pense qu'il s'agit principalement d'un problème d'éducation vis à vis des outils de communication fournis par internet. On sait quel comportement adopter (en règle générale) lorsque l'on sait justement identifier la catégorie de troll à laquelle on fait face. Au même titre que l'on sait maintenant reconnaitre une tentative de phishing, un hoax, un fake...
Quand j'étais gamin et que je me faisais embêter par mes petits camarades de classe, ma mère me disait de laisser faire et de les ignorer. Le jour où j'ai été en mesure d'appliquer cette consigne, les "vilains" ont finis par me laisser tranquille et je me suis déjà senti bien mieux dans mes baskets.
Dans le même esprit, la première consigne que vous entendrez dans 99% des cours de self-défense (quelque soit la discipline) sera : si vous le pouvez, évitez l'affrontement/prenez la fuite. Si vous ne pouvez pas, alors seulement, essayez de vous défendre.
En ce qui me concerne, je considère que c'est la même chose sur internet. Si on est face à un simple plaisantin, on laisse filer sans chercher l'affrontement. Si on est face à un type plus sérieux qui ne compte pas en rester là, on fait appel aux autorités compétentes (administrateurs du site concerné dans un premier temps, puis la justice si ça va vraiment trop loin).
Pour moi, dire que la tolérance au troll est en partie responsable dans la fabrique des débordements, c'est un peu comme dire que les jeux vidéos sont responsables de la violence (c'est presque un troll en soi :)).
À la base, il y a des gens jugés comme étant "malsains" (stalkers, sexistes, homophobes, racistes, et j'en passe). Qui le sont devenus pour une raison X ou Y. Puis ils ont trouvé un vecteur de communication pour exprimer leur opinion, ou assouvir leur désir. Et pas l'inverse.
Ce n'est bien évidemment que mon avis :).
@Zoé : Merci !
RépondreSupprimer@Lays : En fait, je ne traite pas non plus vraiment de comment réagir face à un troll, malveillant ou pas. Je n'ai pas de solutions miracles à proposer. Je voulais juste inviter à réfléchir au fait que la culture troll ne se limite pas aux seuls trolleurs, mais constitue un ensemble plus large auquel participe ceux qui réagissent au troll.
@Klendathu : C'est justement cette idée qu'il faut "prendre à la légère" qui fait problème : elle suppose un monde idéal où le trolleur est seul, sans liens avec des personnes qui peuvent prendre son troll au sérieux, que ce soit pour le poursuivre ou pour en souffrir. Cette position qui fait l'hypothèse que seules comptent les intentions des individus et non leur réalité objective dans des structures sociales est ce qui pose problème. Ce point est approfondie dans le deuxième billet.
@Archonium : la comparaison avec les cours de self-defense me permet de poser un point : on peut au niveau individuel penser que la bonne solution est la fuite, mais cela ne veut pas dire que ce soit la seule réponse. Si vous êtes agressé et que vous fuyez, cela ne vous empêche pas de porter plainte par la suite : l'agression demeure. Cela ne vous empêche pas de vouloir combattre la culture du viol par ailleurs. La réponse individuelle ne peut être la seule réponse.
Je n'aime pas non plus cette idée selon laquelle il y aurait des gens méchants "à la base" et qui trouveraient ensuite sur Internet le moyen d'être méchant. Nous devons envisager ce qui les rend méchants : je ne mets pas Internet en accusation, je mets en cause une culture, c'est-à-dire des individus et des relations sociales. C'est la même chose pour les jeux vidéo : il ne faut pas croire que c'est le jeu lui-même qui agit, mais on peut s'intéresser à la culture des joueurs et, finalement, à ce qu'ils font des jeux.
Bonjour M. Colombi,
RépondreSupprimerPremièrement, je souhaitais vous dire que j'apprécie beaucoup vos articles. Vos réflexions sont souvent une source de soulagement face à des combats quotidiens qui ne sont pas simples.
Être progressiste et défendre ses idées n'est pas évident, surtout lorsque nous sommes entourés de si peu de gens qui prennent le temps et la peine de se questionner sincèrement sur les sujets sociaux comme vous le faites.
Je suis d'accord avec vos idées dans votre critique de la culture troll 1 et 2. Cependant, je me questionne à savoir s'il y a véritablement des solutions efficaces face aux trolls et quelles seraient-elles...surtout lorsqu'on s'y retrouve confronté sur un forum, un réseau social voire même dans les relations interpersonnelles de la vie quotidienne.
Toutes les situations "trollesques" ne sont pas passibles de poursuites comme le cas que vous mentionnez dans votre article. En effet, la plupart se manifestent simplement à travers des discussions d'opinions, d'une façon qui se veut "banale" et camoufle sa violence derrière des remarques acerbes sous le bouclier de la liberté de parole, comme vous le savez. Il arrive donc de se retrouver désarmé face à ces situations.
Le fait est qu'on se retrouve souvent seuls face à ces personnes et, en plus, face à une communauté non-soutenante. Y réagir individuellement en répondant à chaque pique, chaque remarque provocatrice, chaque imbécillité, nécessite une dépense d'énergie considérable, qui n'apporte souvent pas grand chose au débat ou au sujet défendu en plus d'entretenir un sentiment de solitude extrêmement pesant et engendrer encore plus de violence.
Que peut-on faire, en tant que membre d'une société, pour ne pas endurer silencieusement ces agressions, mais ne pas non plus tomber dans l'épuisement du cercle vicieux engendré et recherché par le troll ?
Puisque la solution n'est pas d'ignorer ou de "choisir ses batailles", que reste-t-il à faire ? Je comprend et respecte votre point de vue quand vous dites que le "don't feed the troll" contribue à une minimisation, un rejet de la faute et une tolérance inadéquate du phénomène. Cependant, bien que ce soit légitime de le souligner, ça n'apporte pas de solutions.
Personnellement, j'ai beau avoir de l'imagination et user de créativité, je n'ai pas encore trouvé de façon adéquate et vraiment efficace de répondre à ce genre de provocation - bien qu'ayant essayé plusieurs choses - les trolls étant évidemment bien peu enclins à voir les conséquences néfastes de leurs actes ou paroles, même en leur mettant sous le nez.
De votre côté, auriez-vous des idées la-dessus ?
@Denis Colombi:
RépondreSupprimerSur Wikipédia, l'approche conseillée était la suivante:
* Ne pas "nourrir le troll" en s'engageant avec lui dans des polémiques filandreuses, ce qui en fait le réjouit.
* Notamment, ne pas en faire une célébrité (le troll ne doit pas pouvoir se vanter de ses batailles auprès de ses copains).
* En revanche, demander le blocage, voire l'exclusion de la personne.
Transposé à la vie courante, ce serait donc : "ne perdez pas du temps en bagarres répétées avec les agresseurs, appelez la police".
"En argot Internet, un « troll » est une personne qui participe à une discussion ou un débat (par exemple sur un forum) dans le but de susciter ou nourrir artificiellement une polémique, et plus généralement de perturber l'équilibre de la communauté concernée."
RépondreSupprimerSeulement comme il est très compliqué de démontrer d'une personne que sa motivation n'est pas de débattre mais " de susciter ou nourrir artificiellement une polémique, et plus généralement de perturber l'équilibre de la communauté concernée ", on peut dire du mot "troll" qu'il n'est qu'à l'appréciation de celui qui juge des motivations de son interlocuteurs (sur un forum, ses modérateurs, les participants) et que puisqu'il veut tout dire, il ne veut plus rien dire non plus.
Merci pour ce commentaire. Je vous invite maintenant à lire le billet.
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